Errance musicale

C’est un véritable zombie qui aire dans les couloirs du Bunker, la bave aux lèvres, avide de drogues, un vrai clebs qui cherche son os… Il est complètement paumé et finit par se retrouver dans la cafétéria sans trop savoir comment ni pourquoi.
Avec une frénésie dont seul un camé en état de manque est capable, il commence à tout retourner dans la pièce, détruisant systématiquement tout ce qui ne lui semble pas digne d’intérêt. (Beaucoup de choses donc !)
Les chaises volent à travers la pièce, les tables sont retournées ou jetés contre les différents distributeurs de bouffe, l’état de manque de H qui s’aggrave de minute en minute semble décupler sa force déjà impressionnante. Un de ces projectiles finit par percuter le Juke Boxe qui se met soudainement en marche, une musique retentit alors dans la pièce, c’est un vieux tube de Madonna :

“Like a virgin(yeah),touched for the very first time.
Like a virgin
When your heart beats
Next to mine”

On dit que la musique adoucis les mœurs, mais ce n’est pas une règle universelle. La chanson n’arrange pas l’état de H bien au contraire. Les paroles raisonnent dans sa tête tel des coups de marteaux piqueurs et ne font qu’augmenter son agressivité, il entre dans une rage noire et se jette sur la machine d’où sort l’insupportable son et la bourre de coup de poing.

Il a beau frapper, la mélodie continue de plus bel et ce n’est que lorsque sa main n’est plus qu’un bout de chair sanguinolent qu’il renonce enfin a sa soif de destruction. Comme pour le narguer l’appareil passe à la chanson suivante, cette fois c’est la voix de Britney qui se répand dans l’espace.

"Oh baby baby Oh baby baby
Oh baby baby, how was I supposed to
Oh baby baby, I shouldn't have let you
And now you're out of sight,
Show me how you want it to
Tell me baby cause I need to know that now, oh because..."

Exaspéré H s’affale sur une des chaises survivantes et avec sa main valide gobe deux nouveaux cachets de SUB.
L’effet est immédiat, H voit soudainement devant lui une blonde hilare qui se déhanche au rythme de la musique tout en braillant les paroles comme une truie…Aussitôt il bondit de sa chaise et se met à poursuivre l’étrange apparition, en vociférant, renversant les dernières chaises encore intacts et bousculant tout ce qui se dresse sur son passage..

- Vient la salope, je vais t’apprendre ce qui arrive a celles qui se foutent de ma gueule! Viens sale putain, ça va être ta fête ! Si je t'attrape je t'éclate! Arrête cette merde tout de suite, ça me rend cinglé!!!!

La réponse ne se fait pas attendre…

"My loneliness is killing me
I must confess I still believe (still believe)
When I'm not with you I lose my Mind
Give me a sign, hit me baby one more time !"

L'esprit un peu moins vaseux depuis ses ablutions, Isaac s'asseoit dans l'ascenceur et se traîne de couloir en couloir, poussé par un besoin de caféine brûlante.
Il se retient au cadre de la porte pour contempler le spectacle d'un oeil atone.

- H... Mon petit... Mais qu'est-ce que tu as encore fait à cette pauvre Britney ?

Dans sa folle course contre le fantôme de Britney, H n’a pas vraiment eu le temps de remarquer Issac qui se tient prêt de la porte et observe la scène en souriant. Pas plus qu’il n’a entendu sa remarque, il est totalement obnubilé par son hallucination…
C’est seulement lorsque la pièce est totalement dévasté que le géant s’autorise une pause pour reprendre son souffle…De toute façon cette salope à la croupe bien trop agile, jamais il n’arrivera a l’attraper. Il lui faut de la came… C’est à ce moment que la musique s’arrête enfin…
Il se retourne alors vers la sortie et découvre le docteur. Immédiatement il est persuadé que ce type est en train de se foutre de sa gueule (Et après tout il y a de quoi non ?)
Il se dirige vers lui d’un air menaçant, il brandit son unique poing valide, telle une arme , son autre main pendant mollement le long de son corps. Le membre décharné saigne abondamment mais il ne s’en préoccupe pas, toute son attention est maintenant focalisée sur ce drôle d’énergumène qui vient d’arriver…Même Britney qu’il entend rire dans le fond de la pièce ne l’intéresse plus du tout.

Il vient se poser juste devant Isaac qui lui fait l’effet d’un nabot. Comme il le domine nettement, un sentiment de pure confiance l’envahit, ce type est à sa merci et en plus contrairement a Britney, il n’a pas l’air de courir bien vite... Evidement il ne l’a absolument pas reconnu tant la drogue a ravagé son cerveau et sa mémoire déjà bien maigre en tant normal…
Il s’apprête donc à lui casser la gueule dans les règles, lève sa main, jubile déjà d’avance à l’idée de passer à tabac cette âme innocente...

Et s’arrête soudainement au moment de frapper. Un miracle improbable s’est produit : un éclair de lucidité vient de traverser son esprit embrumé par les drogues. En examinant un peu mieux la créature qui se tient devant lui, il remarque une paire de lunette, preuve irréfutable que ce mec est un intello.
Les gens intelligent sont souvent médecin ou métier compliqué dans le genre et les médecins savent en gros comment on fabrique la came, si il sait en fabriquer, ça veut dire came à volonté pour lui et donc ça veut dire fin de ses problèmes et de ce putain d'enfer…

C’est ce raisonnement plus qu’absurde qui avait sauvé la tête d’Isaac de la bastonnade. Il lui tapote sur l’épaule…

- Hey le binoclard ! Ca gaze ? Je crois que j’ai besoin de toi !

Sans attendre une réponse il se racle la gorge bruyamment et crache un énorme mollard.

- Je pense que toi, tu sais fabriquer de la dope et je suis sur que moi j’ai vraiment besoin d’en prendre !!! Rapidement !!!! Donc faudrait se mettre au taf tout de suite mon gars…Je suis sur que tu tiens à ta paire de lunette ! Et quand je suis en manque j’ai tendance a m’énerver vite...

Il s’écarte un moment et l’état désastreux de la pièce vient confirmer sans peine ses dires…

Le toubib glisse latéralement le long du mur pour étudier le champ de bataille. Il discourt avec mollesse :

- Alors...
Tu pense que je sais, et tu es sûr d'avoir besoin... de ma paire de lunettes...

Hmm, addiction sévère... Je vais te prescrire un... palliatif...


Reportant son attention vers H, bouche ouverte comme un poisson, il incline la tête pour enlever ses lunettes et les tendre à l'enragé en clignant des yeux. Enfin il lui répond, empruntant la voix apaisante et professionnelle du bon médecin de famille qu'il n'est pas.

- Très bien mon petit.
Wendy, apportez-moi un café : on va avoir du boulot !

Non, c'est bien à H qu'il s'adresse avec un petit hochement de tête...

H n’a pas compris la blague ou du moins il n’a pas voulut la comprendre.
Il a simplement l’impression que ce mec se paye sa tête et ça on l’aura comprit il n’aime pas du tout… Il va devoir l’expliquer à ce bouffon ce qui l’amuse d’avance. Il doit simplement se rappeler de ne pas trop l’abîmer, il faut qu’il puisse lui fabriquer de la Dope.

Il commence par éclater les lunettes d’Isaac en les pressant comme une vulgaire grappe de raisin. Puis il laisse doucement tomber ce qui en reste au sol, un sourire sadique au coin des lèvres.
Il ne laisse pas le temps à Isaac d’émettre la moindre protestation et lui envoi direct un grand coup de son immonde tête…Dans la tête justement !
Le choc est très violent et le malchanceux médecin est projeté au sol.
H s’avance tranquillement vers lui et regarde sa proie couchée au sol d’un air très satisfait. Visiblement il n’a pas très bien compris comment il s’était retrouvé aussi vite par terre, il est totalement vulnérable et à sa merci. Le genre de situation qu’H aime particulièrement. Pour la première fois depuis un certain temps il se sent presque bien.

- Ecoute moi trou du cul...C’est pas compliqué en somme… On peut être de très bon pote et y aura pas de lézard…Vraiment ! Ou alors tu peux continuer a jouer les comiques vaseux mais je te préviens je suis pas bon public du tout!!!

A ce moment là il l’attrape par le col avec son unique main valide et le décolle du sol comme si il s’agissait d’une simple marionnette. Puis il le plaque violement contre le mur tout en continuant à le soulever et colle son visage gras à celui d’Isaac qui n’a pas l’air franchement rassuré face à cet impressionnant molosse.
Il le regarde droit dans les yeux avec ces horribles pupilles injecté de sang et lui crache à la gueule lui faisant profiter de son haleine si particulière…


- Alors binoclard, tu choisis quelle option ?

Collé au mur, Isaac cille plusieurs fois très vite avant de se reprendre.

- Ooooookay H, je vais te fournir le... nécessaire... Détends-toi s'il te plaît...

Il lui flatte une épaule d'un air compatissant. Les muscles qu'il touche seraient bien capables de lui briser le cou, mais l'autre sait bien qu'il devrait se passer de came dans un tel cas de figure. Enfin, il doit le savoir.
Sûrement.

- Un petit fix pour oublier tout ça ?
C'est pas grave pour mes lunettes, t'en fais pas.
Et puis on enverra quelqu'un pour ranger le bordel.
Et je vais refaire un peu de morphine pour mon front.
Et prendre un petit café aussi.
...Tu devrais me lâcher maintenant, pour qu'on s'occupe de ta santé, d'accord ?

Il se dégage progressivement de la poigne du dément et rejoint en deux pas la compagnie plus agréable de la machine à café. Ses doigts courent sur les commandes.

- Ca arrive, ça arrive... Sans ça je pourrais pas t'aider. Juste un café. Pas long. Oh non, pas long. Presque prêt... Pense à ton meilleur trip, mon petit, ça arrive...

H surveille attentivement Isaac se diriger vers la machine à café. Il ne tolérera pas une nouvelle entourloupe. De toute façon il bloque la porte, unique sortie de la pièce avec son immense corps qui forme une véritable muraille infranchissable.

Il trépigne d’impatience et se sent obligé de reprendre un petit SUB direct. Si ce con n’a pas menti il devrait bientôt avoir de la dope…
Mais si il s’est foutu de sa gueule ??? Si il avait mentit pour pas se faire démolir? C’est le dernier cachet de la boite qu’il vient d’avaler ensuite il n’aura plus rien…Il sent la panique qui monte en lui alors que sa main recommence à méchamment trembler, une nouvelle crise va pas tarder à se manifester….Faut que ce couillon se grouille.

Cette fois il l’interpelle avec un regard plus effrayé qu’effrayant.

- Hey le binoclard! On pourrait y aller maintenant ? J’ai vraiment besoin d’un petit taquet !!! Magne toi ça urge!

Le petit gobelet tombe avec un tintentement de plastique recomposé. Isaac observe avec fascination, agenouillé à sa hauteur, le précieux liquide chaud qui le remplit progressivement. Ses doigts l'enserrent et le portent à ses lèvres. Il jette un rapide coup d'oeil par dessus le bord du gobelet : la brute est à bout de nerfs. Vite, il s'enfile la moitié de l'erzatz de café - homonyme fortuit n'ayant aucun rapport avec la plante - et se relève en se tenant la gorge, dévastée par la boisson bouillante.

- Hrrrrm...

Bien bien bien, en route mon petit, le paradis t'attend.
Eve va te faire une scène si tu traînes... tu sais comment c'est.
Allez, en avant, hopopop !

Il marche sur H qui est bien obligé de s'écarter pour le laisser prendre à grands pas traînants la direction de l'ascenceur.

H suit péniblement Isaac dans l’ascenseur. Sa chemise est trempée de sueur, il n’a vraiment pas l’air sans son assiette. La crise de manque s'aggrave, première conséquence sa vision redevient flou c’est vraiment la merde…
Il est obligé de se baisser pour s’engouffrer dans le mince habitacle.
L’espace est vraiment réduit surtout pour le médecin qui se retrouve compressé entre la paroi froide et métallique de l’ascenseur et la bouillante masse musculaire de son nouveau compagnon, il est coincé. Ce dernier est d’ailleurs en proie à une sudation importante et à une crise de claustrophobie intense. Les deux phénomènes sont d'ailleurs intimement lié, une chose est sur ça n’améliore vraiment pas la position déjà inconfortable d’Isaac.

H suffoque à chacun de ses mots, son corps recommence à trembler…


- Grouille toi mec, je veux pas crever dans ce putain d’ascenseur !!!

Le similicafé est en train de dissoudre la gueule de bois du toubib, encore un peu vaporeux. Mais un constat le frappe de plein fouet : l'idée d'emprunter l'ascenceur avec son nouveau patient est un désastre incontestable. En temps normal il ne pèse déjà pas grand chose face à la grande brute, mais ici, coincé dans ce petit compartiment alors que l'autre sera d'un instant à l'autre submergé par le manque...
Il avale sa salive, puis le reste de son café, tousse en dissimulant sa nervosité. Les portes s'ouvrent sur le premier étage et il s'y précipite comme si on l'éjectait de la cabine.

Regardant le sol qu'il connaît par coeur, le petit homme se dirige à grandes enjambées vers l'infirmerie.

[ l'infirmerie]